Courir sur l’eau et sous les rouleaux

Il est 8 heures à Saint-Malo. Après quelques minutes d’échauffement sur les remparts, nous sortons de l’« intra-muros » pour arriver sur la plage du Sillon. Le ciel est dégagé, la mer est basse, l’eau est encore en train de se retirer.

Courir sur l’eau

Une bande de plusieurs dizaines de mètres s’offre à nous, entre les vagues et le sable sec. Le sol est recouvert de sable luisant au soleil, de petits ruisseaux, de flaques de quelques millimètres de profondeur ou de plusieurs centimètres. Le ciel se reflète dans ce miroir inégal et mouvant.

Nous avons vraiment l’impression de courir sur l’eau et même sur le ciel. Il faut enjamber certaines flaques, zigzaguer. Notre pied d’appui s’enfonce plus ou moins dans le sable. Parfois on atterrit dans une flaque un peu plus profonde et on s’éclabousse. C’est très ludique, on s’amuse en courant, on ne voit pas le temps ni les kilomètres passer.

Puis on quitte le sable pour aller au bout de la Pointe de la Varde par le GR 34. Les sensations sont différentes sur ce sentier de terre et légèrement caillouteux. Les couleurs sont magnifiques : le vert et jaune des genêts, les teintes bleutées de la mer et du ciel, le gris de la roche granitique…

Sur le chemin du retour, on croise une femme qui court pieds nus dans l’eau. On décide de l’imiter. C’est bon de sentir le sable et l’eau (froide !) se glisser entre les orteils. Mais notre course est beaucoup plus heurtée. Par manque d’habitude sans doute, on se sent drôlement lourds à l’impact, même avec la souplesse du sable. On parcourra les derniers kilomètres avec les baskets aux pieds. 

Courir sous les rouleaux

Deux jours plus tard, même heure, même endroit, mais autre ambiance. Cette fois, la mer est haute et le vent souffle du large. La plage a complètement disparu sous l’eau. Les vagues heurtent la digue violemment, malgré les nombreux brise-lames en chêne. Nous courons sur la chaussée, de l’autre côté.

Ça sent bon l’iode, les embruns, la petite tempête. Le vent nous chahute. De temps en temps, au gré de la force et du mouvement des vagues, des tentacules d’eau de mer surgissent de derrière la digue : devant nous, derrière nous ou juste à notre niveau. On prend plusieurs douches. On sursaute, on rigole, on dégouline. Quelques heures plus tard, nous sommes dans le TGV en route vers Paris. Les images et les sensations de ces deux courses encore bien fraîches dans nos mémoires et dans nos corps. Nous reviendrons en Bretagne.