Après notre escapade campagnarde et avant repartir vers l’effervescent 11e arrondissement, j’ai proposé à Mathieu de faire un crochet par le village de Charonne.
Un village dans Paris, me direz-vous, ça existe (encore) ?
Sans doute plus vraiment, quoique celui de Charonne en a encore l’allure, l’aspect et l’élégance.
Le village de Charonne n’est plus celui du chiffonnier, conté par Paul Cadot en 1863 et mis en musique par Jules Deschaux dans une chanson réaliste. [1] On n’y a pas trouvé de loq’s sentant la Charogne, ni de mangeurs de blanc, / Dévalisant l’gars qui roufionne / Saoûl et affalé sur un banc.
Il est certain, que dans le Paris d’aujourd’hui, ces gens existent encore et, parfois, en nombre important. Mais à Charonne, c’est différent.
À Charonne, les maisonnettes sont nettoyées, les ruelles colorées, les pots de fleur alignés, les vitrines bien rangées, les façades épurées.
À Charonne, la gentrification est passée par là, elle a laissé derrière elle un quartier préservé et totalement boboïsé.
À Charonne, il fait bon flâner, oublier le vacarme de la rue de Bagnolet non loin, respirer la ville et savourer sa tranquillité.
À Charonne, on a apprécié la place et la rue Saint-Blaise, depuis laquelle on a admiré l’église Saint-Germain de Charonne, la dernière de Paris. L’Histoire nous dit que sa construction mélange des architectures du 13e, 15e et 18e siècles et qu’elle présente la particularité unique, avec l’église Saint-Pierre de Montmartre, à avoir conservé son cimetière paroissial. L’histoire, quant à elle, nous dit que c’est dans cette église que la scène finale du film Les Tontons Flingueurs de Georges Lautner a été tournée. [2]
Nous avons poursuivi notre déambulation en direction de la rue des Balkans jusqu’au Jardin de l’Hospice Debrousse, lieu de détente des familles du quartier. Le Pavillon de l’Ermitage, qui se trouve en bordure du jardin, ne nous a pas éblouis, mais il plaira sans doute aux amateurs d’Histoire. Seul vestige encore visible du Château de Bagnolet, cette maison a été acquise par la Duchesse d’Orléans (fille de Louis XIV et de la marquise de Montespan) en 1719. [3]
Notre escapade avait commencé à la campagne, en dehors des sentiers battus. Elle s’achève dans la nature, en dehors des sentiers. Nous atterrissons, par la rue de la Réunion, au Jardin Naturel Pierre-Emmanuel. [4] Je suis enthousiaste de cette végétation à l’état sauvage : pelouse calcaire, mini-prairie, étang, friche urbaine… sur près de 6500 m2 ! Le jardin est entretenu dans le respect des cycles naturels. J’observe à nouveau Mathieu, que je sens un peu sceptique. Je le sais aussi plus sensible aux jardins à la Française, comme le Parc de Sceaux [5] qu’il m’a fait découvrir à l’occasion de footing matinaux. L’esprit taquin, je ne peux m’empêcher de penser que si Le Nôtre avait, en son temps, fumer des herbes folles, comme les petits gars que nous avons surpris dans un recoin, il aurait peut-être dessiné des jardins naturels.
[1] Texte original disponible sur la base d’archivage Gallica de la BNF : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k921285v.image
[3] Source : https://www.unjourdeplusaparis.com/paris-balades/balade-charonne-20e-arrondissement
[4] Source : https://www.unjourdeplusaparis.com/paris-vert/jardin-naturel-pierre-emmanuel
[5] Une image du parc de Sceaux dessiné par Le Nôtre : http://domaine-de-sceaux.hauts-de-seine.fr/ledomaine/
Effectivement, je n’ai pas été séduit par ce jardin. Naturel, peut-être, mais je l’ai trouvé étriqué et plutôt sale. Le reste de la balade était dépaysant. Merci pour cette découverte Cécile !
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